L’ancienne footballeuse et capitaine du Paris Saint-Germain a rangé les crampons l’été dernier, à 31 ans. Aujourd’hui, elle s’épanouit dans son travail au sein de la Fondation du PSG, un organisme qu’elle a intégré en 2008 en tant que stagiaire et qu’elle n’a plus quitté depuis ! Pendant sa carrière, Sabrina Delannoy était en effet une des (très) rares joueuses à travailler à côté du football. Une expérience selon elle primordiale, qu’elle se donne désormais pour mission de transmettre aux jeunes générations.
PAR FLORIANE CANTORO
Extrait du magazine WOMEN SPORT N°8 d’avril-mai-juin 2018.
Dans la même thématique, lire également les articles Reconversion des sportives : et après, on fait quoi ? et le témoignage d’Aurélie Muller : «Sport et études, on ne peut pas être à 100% sur les deux».

Vous avez toujours travaillé au sein de la Fondation du PSG parallèlement à votre carrière de footballeuse. Une nécessité ou une sécurité ?
Au départ, c’était nécessaire car mes revenus de joueuse ne me permettaient pas d’assumer toutes mes charges. Puis, en 2012, quand le nouvel actionnaire est arrivé au PSG, la section féminine est devenue complètement professionnelle ce qui a engendré des niveaux de rémunération plus élevés. Même si financièrement je n’en n’avais plus besoin, j’ai choisi de continuer à travailler au sein de la Fondation pour diverses raisons. C’était important pour moi d’avoir une bulle d’oxygène différente de celle du football. Quand on est sportif de haut-niveau, on a tendance à vivre dans une bulle déconnectée de la « vraie vie ». Or, je suis persuadée que le fait d’avoir été impliquée au sein de la Fondation a été un levier de performance pour moi. En même temps, je m’assurais un avenir sécurisé : j’étais en CDI ce qui m’enlevait ce poids que peuvent avoir certains sportifs quant à l’après-carrière.
Vous a-t-on encouragé dans ce double projet ?
Christine Le Gal, la directrice de la Fondation, m’a toujours poussée dans cette voie. J’avais un emploi du temps complètement adapté en fonction de mes entraînements, ce qui n’est pas toujours évident à trouver et à négocier dans le monde des entreprises. Les instances et la direction du PSG m’ont également toujours donné leur aval. Là où j’ai rencontré plus de difficultés, c’est avec le staff technique qui ne voyait pas forcément d’un bon oeil que sa joueuse, au lieu de se reposer et de récupérer, allait travailler. Mais mes performances étaient bonnes et je ne me suis jamais blessée. La réponse était sur le terrain. C’est comme ça que j’ai réussi à convaincre tout le monde que c’était pour moi le meilleur choix possible.
« Quand on est sportif de haut-niveau, on est dans une bulle déconnectée de la vraie vie »
Quel regard portez-vous sur les jeunes footballeuses qui, contrairement à vous, n’ont pas connu le milieu amateur ?
Quand j’étais encore joueuse, les jeunes me regardaient un peu comme un extraterrestre quand je me dépêchais à la fin de l’entraînement, que je prenais une douche rapide et que j’enfilais une tenue de ville. Elles ne comprenaient pas pourquoi je travaillais alors que je n’en n’avais pas besoin. Mais j’ai toujours essayé, quitte à passer un peu pour la rabat-joie, de les sensibiliser à l’importance de ne pas décrocher du système scolaire. Aujourd’hui, j’en ai fait une de mes ambitions. À côté de ma mission de conseillère de la section féminine, j’ai demandé à travailler sur l’accompagnement et la reconversion des joueuses. C’est un vrai challenge pour moi. J’aimerais pouvoir les convaincre de suivre quelques formations, des modules ou même juste d’avoir le bac pour certaines.

Sont-elles réceptives à votre discours sur l’importance du double projet ?
Je n’impose rien. Je suis à l’écoute des besoins, disponible et prête à donner des conseils. Je pense avoir la légitimité pour le faire : j’ai joué au club pendant très longtemps, et j’ai réussi à mener mon double projet. Certaines joueuses sont d’elles-mêmes venues me voir pour me demander des conseils. D’autres, à qui j’ai proposé mon aide via des entretiens individuels, ont également été assez réceptives. Je sens que le travail va être long mais qu’il peut y avoir quand même une possibilité d’écoute. Bruno Cheyrou, le nouveau directeur sportif des féminines, a lui aussi été très sensible à ce sujet. Il y a une réelle volonté du club de poursuivre dans cette démarche et de permettre aux joueuses de suivre un cursus en parallèle de leur carrière.
Avec le recul, à quoi attribuez-vous votre excellente reconversion ?
C’est une étape que j’ai longuement préparée. Avec la Fondation, on a mûri pendant plusieurs semaines le contenu de mon nouveau poste pour faire du sur-mesure. Le club m’a très bien rendu ce que j’ai pu lui donner pendant ma carrière de joueuse. J’ai également été suivie par différents interlocuteurs sur le plan psychologique pour éviter un choc au moment de l’arrêt. J’ai vécu ma dernière saison en profitant de chaque instant. Aujourd’hui, je ne suis pas nostalgique : le football ne me manque pas du tout. J’ai écouté mon ressenti : ma motivation qui baissait, le poids des sacrifices qui devenait trop lourd à porter… C’était le bon moment pour moi d’arrêter et la transition s’est vraiment faite en douceur.