Deux ans après les révélations explosives de la patineuse Sarah Abitbol, le monde du sport entend davantage les victimes de violences sexuelles, essaie de comprendre l’emprise et connaît des centaines de procédures. À l’occasion de la troisième convention nationale de prévention des violences dans le sport, plusieurs ministres et acteurs du sport ont fait un point d’étape sur la lutte contre ce fléau.
Cette nouvelle convention a notamment permis de dresser un bilan du travail réalisé depuis le mouvement inédit de libération de la parole des victimes, et de rendre compte de l’action de la cellule et des services déconcentrés du ministère chargé des Sport, et notamment le nombre de signalements, d’enquêtes administratives effectuées ou en cours ou de mesures d’interdiction d’exercer.
« Nous changeons d’ère, le temps du silence est terminé. Il n’y a plus d’impunité. Nous allons essayer d’avoir autant de courage que vous (les victimes) » a expliqué Roxana Maracineanu dans son discours d’introduction lors de cette troisième convention nationale de prévention des violences dans le sport, organisée sous les lambris de l’Assemblée Nationale. « Je suis fière du chemin que nous avons parcouru, de ces sportives qui ont pris la parole dans les médias, de ceux qui ne l’ont pas encore fait, de ceux qui les accompagnent (…) et de ceux qui travaillent dans la cellule », a poursuivi la ministre en charge des Sports. « Nous avons mis du temps à ouvrir les yeux mais soyez assurés que nous ne les refermerons plus », a-t-elle lancé en remerciant les fédérations qui avaient « pris ce sujet à bras le corps », dont plusieurs sont venues témoigner lors de cette convention.
« Nous ne mettons plus la poussière sous le tapis. (…) Le message est clair, il n’y a plus d’omerta et nous demandons à ce que tous les faits soient signalés », a confirmé Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale et des Sports avant de révéler les chiffres des affaires traitées au 31 décembre 2021. « Nous avons pu traiter plus de 655 mises en causes, qui concernent des hommes à 97 % et 54 fédérations », a précisé le ministre.
Fabienne Bourdais, déléguée ministérielle en charge de la lutte contre les violences sexuelles dans le sport, a annoncé avoir renforcé les effectifs de la cellule dédiée. « Trente signalements ont été annoncés depuis le début de la l’année », a révélé la déléguée ministérielle. Elle a rappelé l’objectif ambitieux fixé par la ministre en charge des Sports de sensibiliser et former tous les acteurs sur le sujet, soit près de 2 millions de personnes.
À date, les 108 fédérations agréées (unisport et multisports) sont mobilisées sur cette thématique de la prévention des violences. A l’occasion de la convention, des représentants de fédérations (karaté, taekwondo, cyclotourisme, tennis) ont présenté les outils et les stratégies qu’elles déploient pour sensibiliser et préserver l’intégrité de leurs licenciés.
La ministre chargée des Sports a également fait le point sur le nouveau dispositif de contrôle automatisé de l’honorabilité des bénévoles, opérationnel depuis la rentrée sportive de septembre 2021 et que la loi du 24 août 2021 a étendu aux arbitres, aux surveillants de baignades et à toute personne intervenant auprès de mineurs au sein d’un établissement d’activités physiques et sportives, la même obligation d’honorabilité.
Au 14 février, 68 fédérations ont mis en œuvre le croisement de leurs fichiers, pour un total de 341.000 bénévoles. Par ailleurs, 17 mesures d’incapacité d’exercer comme éducateurs sportifs (6) ou exploitants (11) ont été prononcées, suite à une condamnation inscrite au FIJAIS et 3 mesures d’urgence ont été infligées.
État des lieux de l’activité de la cellule chargée de traiter les signalements de violences au ministère chargé au 31 décembre 2021
• 655 personnes mises en cause par des signalements, dont 97% d’hommes, pour 610 affaires
• 79% des victimes (au moins) sont de sexe féminin
• 365 mis en cause sont des éducateurs sportifs
• 54 fédérations sportives concernées
• 12 affaires sont liées au milieu du handicap
• 84% des victimes étaient mineures au moment des faits
• 89% des faits dénoncés concernent des violences sexuelles
• 291 mesures ont été prononcées par les préfets de département
• 449 affaires sont closes, soit 69%
• 206 affaires en cours au sein des services départementaux.