En l’espace de quelques années, Lucile Woodward est devenue une coache sportive parmi les plus populaires sur YouTube et Instagram. Pourtant, rien de la prédestinait à un tel parcours. Quelle est son histoire ? Comment a-t-elle fait de sa passion une profession ? Nous lui avons directement posé la question.
Propos recueillis de Djelina Ndiaye
Lucile Woodward, Paris, 35 ans est maman de 2 enfants et coach sportive depuis 10 ans. Elle est aussi formée à la méthode Gasquet, en en nutrithérapie, Pilate et TRX.
@lucilewoodward : 123 000 abonnés sur Instagram, 36 670 sur YouTube
Quel a été le déclic pour vous lancer dans le coaching sportif ?
J’ai toujours voulu faire ça, j’ai découvert le fitness à l’âge de 15 ans, j’ai toujours adoré. À l’époque, mes parents m’avaient plutôt conseillé de faire des études, j’ai été à la fac de biologie à Créteil, où j’ai obtenu ma licence. J’ai une maîtrise de journalisme scientifique. À 23 ans, j’avais un blog de journalisme médical. Mais, l’envie a été trop forte : je me suis dit « si je ne le fais pas je vais regretter toute ma vie ». À 23-24 ans, j’ai pris un congé de formation pour passer mon diplôme de coach sportif. Depuis, je mélange mes deux facultés de coach sportif et de journaliste.
Vous avez donc décidé d’être coach sportive avant de vous mettre aux réseaux sociaux ?
Oui bien sûr, j’ai passé mon diplôme en 2007, j’ai commencé le coaching sportif avant.
Comment êtes-vous parvenue à vous faire une place sur les réseaux sociaux ?
Au début, j’étais journaliste médical ; je travaillais beaucoup pour Doctissimo (site d’information et de santé) et quand j’ai passé mon diplôme de coach sportive, je leur ai proposé de faire des vidéos de sport et d’écrire des articles pour le sport et la remise en forme. Quand j’étais enceinte de mon 1er enfant, je leur ai proposé de faire des vidéos de sport pendant la grossesse. Finalement, ils se sont décidés un peu tard donc les premières vidéos que j’ai faites étaient des entrainements après la grossesse (récupérer son ventre plat après la grossesse, abdos…). Les vidéos ont très bien marché donc après on a ouvert une grosse chaîne YouTube où je faisais des vidéos pour la chaîne Doctissimo. Il y avait plein de gens qui posaient des questions en commentaire, du coup on a du commencé à ouvrir un blog pour y répondre. Lorsque le blog a commencé à bien marcher, j’ai ouvert une page Facebook pour que les gens posent leurs questions, ensuite j’ai ouvert mon compte Instagram. Cela s’est vraiment fait au fil de l’eau et au fil de l’intérêt que les gens ont pu porter à ce que je faisais.
Vous travaillez à votre propre compte ?
J’ai beaucoup travaillé pour des salles de sport et maintenant je travaille à mon propre compte.
Est-ce difficile de jongler entre sa vie privée et sa vie professionnelle lorsque l’on est un personnage public et à son compte ?
C’est vrai que c’est compliqué de dissocier les deux. Je me sens plus saine que les autres, j’ai l’impression que j’arrive un petit peu mieux à diriger ou séparer ma vie personnelle et ma vie professionnelle mais c’est sûr que l’un et l’autre empiète vachement. Surtout avec les réseaux sociaux, depuis qu’il y a les « instastory » et Snapchat, on est un peu obligé tout le temps de snapper ou instagrammer en permanence, même quand c’est dimanche et qu’on est avec ses enfants. Moi j’ai l’impression d’y arriver mais mon mari est convaincu du contraire (rires).
Vous faites plus de coaching virtuel ou réel ?
J’ai lancé une web série où j’ai coaché pendant 1 an 5 personnes avec des profils et des formes différents sur YouTube. Sinon je propose des plans d’entraînement sur mon site, il y a des rééquilibrages alimentaires et des ebooks de recettes. Je ne sais pas vraiment si cela peut s’apparenter à du coaching virtuel mais je propose mes services sur le web via des ebooks. Des coachings réels j’en fais encore, pas beaucoup mais de temps en temps. Sinon je fais beaucoup de cours collectifs événementiels.
Sur quel modèle économique fonctionnent vos réseaux sociaux (investissement pour gagner des abonnés) ?
J’ai une S.A.R.L, j’ai deux salariés et un contrat en alternance. Je fais appel aussi à des indépendants à droite à gauche donc on investit énormément pour faire de la publicité sur Facebook et Instagram. J’essaye surtout de faire de la qualité, j’ai un photographe, des équipes de tournage qui me suivent pour faire des vidéos de qualité.
Avez-vous déjà fait face à des préjugés ou des discriminations de genre, dans le sport et votre métier en particulier ?
Non pas trop car je me suis vraiment spécialisée pour la femme, j’ai commencé à être sur les RS j’avais déjà des enfants donc au contraire. Le fait que je sois une femme et que j’ai des enfants, c’est vraiment un atout. Je peux être comparée à des gens qui sont comme moi.
Quelles solutions pourraient-être apportées selon vous, pour mettre davantage en avant les femmes dans le sport ?
On parle souvent des faux sports (danse, zumba…). Souvent les sports de femmes ne sont pas considérés comme des vrais sports donc on y travaille. C’est quand même en train de changer.
Ce qui me choque vachement et me fait vraiment très peur, c’est l’orientation très muscu et porno chic de la remise en forme surtout vers les femmes. Les poses de cul, de faux seins je trouve ça vraiment choquant et je trouve que ça ne va pas du tout dans le bon sens, on est pas du tout obligé de sexualiser la forme pour que ça fasse rêver et que ce soit professionnel. Je suis très inquiète de cette hyper sexualisation de la remise en forme. Je m’inquiète aussi de l’énorme lobbying que font les industries de protéines en poudre qui sont très mauvaises pour la santé et qui financent des jeunes qui n’y connaissent rien et qui vont vendre des protéines alors qu’ils n’en consomment pas mais qui sont prêts à dire tout et n’importe quoi pour avoir leur contrat.
Montées grâce aux réseaux sociaux, ces boites s’y connaissent très bien en réseaux sociaux et vont les aider à monter du coup ça fait boule de neige et on a l’impression que pour être en forme il faut être hypersexualisé et prendre de la protéine en poudre alors que c’est archi faux. C’est une végétarienne qui vous parle !
Je suis diplômée, sur-diplômée, j’adore mon métier, c’est ma passion, je suis spécialisée dans le corps des femmes et dans la nutrition normale avec de vrais aliments normaux qui sortent de la terre et qui n’ont pas été fabriqués par des industriels. Au final, alors que je suis la personne la plus normale, j’ai l’impression d’être une rebelle parce que je suis la seule à ne pas prôner la protéine et le sport ultra-muscu.
Quels seraient vos conseils pour motiver les femmes qui voudraient créer leur propre entreprise comme vous ?
Il ne faut pas avoir trop peur et il faut se lancer car on a tous notre mot à dire et quelque chose à apporter. Après, il faut bien en parler à son conjoint et toujours expliquer ce qui se passe. C’est cool d’avoir des copines et un conjoint qui soit d’une proximité bienveillante parce qu’on en voit parfois des conjoints un peu jaloux qui comprennent pas et qui n’acceptent pas. Donc il faut être accompagné par des personnes intelligentes et bienveillantes.