Maladie et APA : quand le sport s’invite à l’hôpital

Concept encore trop peu usité, le sport à l’hôpital se développe depuis quelques années. Nécessitant des fonds, des accords, des partenariats, de l’espace et du personnel, il trouve peu à peu sa place. Et pour cause, les bénéfices à pratiquer une activité physique pendant une maladie sont nombreux.
Par Léa Borie
Extrait du magazine WOMEN SPORTS N°22 d’octobre-novembre-décembre 2021

Voilà maintenant plus de 20 ans que la pratique spor­tive a commencé à se dé­velopper à l’hôpital. Cela a été rendu possible grâce à de multiples études qui ont attesté de l’intérêt du sport dans la guérison du patient. On en a terminé de croire qu’il faut que la personne malade reste alitée à se reposer. Au contraire, quand sa pa­thologie le lui permet, elle doit bouger, se dépenser, rester active !

Les APA (activités physiques adaptées) à l’hôpital, mode d’emploi

L’activité, une façon de ne pas se sentir que malade ou handi­capé

Pratiquer un sport à l’hôpital demande aux enseignants APA (activités physiques adaptées) de faire passer une envie avec humour et légèreté, pour se défou­ler, penser à autre chose, progresser… Ainsi, le patient devient acteur de sa maladie, comme si ce n’était plus elle qui commandait, et qu’il fallait relever la tête plutôt que d’attendre que la mala­die gagne du terrain. L’apport social des cours collectifs n’est pas à négliger. C’est une manière de rompre l’isolement.

Sur le plan santé, on maintient une condition physique, ce qui diminue la fatigue et la prise de poids. Dans le cas d’un cancer, les études montrent qu’une pratique spor­tive diminue le risque de récidive de 34 %.

Chez les plus jeunes, fragilisés psychologi­quement et physiquement par la maladie, c’est un moyen de retrouver confiance. « Les sports qui ont le plus la cote auprès des jeunes : les sports de combat. On af­fronte un adversaire comme on peut af­fronter la maladie, on met en jeu des qua­lités de combativité et en même temps de défense », détaille Viva Magazine.

Cela ne vient pas de nulle part. La mise en place de tels protocoles se base sur diverses recommandations, comme celle de l’Institut national du cancer (INCA), qui suggère 5 séances de 30 mi­nutes d’activité physique par semaine, d’intensité modérée à élevée type aéro­bie, associée à du renforcement muscu­laire.

Des bienfaits dont s’est saisi le Centre Léon Bérard

Le Centre Léon Bérard (CLB), centre de lutte contre le cancer à Lyon, étudie depuis 2016 les effets de l’APA auprès d’une population de patients. Une pre­mière européenne baptisée « Able ». Cette même année a été mis en place un nouveau programme APA en parte­nariat avec l’Institut d’hématologie et d’oncologie pédiatrique de Lyon, dédié aux jeunes de 15 à 25 ans atteints de cancer.

Cette prise en charge spécifique a pris de l’ampleur en 2018 grâce à des tra­vaux permettant l’installation d’une salle de sport dédiée au sein de l’établisse­ment de santé. Premier centre d’Au­vergne-Rhône-Alpes à se doter d’une telle structure, le CLB s’est appuyé du Comité du Rhône de la Ligue contre le cancer et de l’association Courir POUR ELLES (dont on vous parle pages 52-55 dans les courses solidaires).

Quantité d’associations et hôpitaux se mobilisent

D’autres centres hospitaliers ne sont pas en reste. Ils sont de plus en plus nombreux à dispenser de la réhabilita­tion à l’effort pour améliorer la qualité de vie. À Paris notamment. La Maison de l’enfant de l’Hôpital Robert-Debré propose des animations pour les jeunes à l’hôpital. De même pour les adultes à l’Hôpital Saint-Louis, avec des activi­tés au sein de ses salles et gymnases. D’autres CHU comme à Montpellier, Lille ou Marseille, ont leur espace de sport dédié.

Au CHU d’Angers, des parte­nariats existent entre l’hôpital et les clubs de sport, avec notamment des cours d’éducation pour patients obèses. Quant à Caen, le CHU a même été ré­compensé en décembre 2020 pour sa salle d’activité physique. Il a reçu le prix national « Sentez-vous sport » du Comi­té national olympique et sportif français pour sa salle dédiée au personnel. Mais cet espace sert aussi de support aux protocoles de recherche clinique. Il ac­cueille des patients atteints de patho­logies diverses nécessitant la pratique sportive. Un double emploi suffisam­ment précurseur en France pour être salué.

Côté associations, Premier de cordée s’investit depuis 1999 auprès des en­fants. Depuis le lancement de cette initiative, 17 000 jeunes ont bénéficié de la pratique d’une activité. Un maillot pour la vie, créé en 2006, organise des goûters-dédicaces dans les services pédiatriques avec des sportifs de haut niveau. Pour les adultes, et notamment les femmes, l’association Siel Bleu intervient à l’Institut Curie avec le pro­gramme Activ’ composé de cours de danse, gym, step ou vélo.

Même si les restrictions liées à l’épidémie de Covid-19 ont rendu plus compliquées les actions de ces associations, toutes ont fait preuve d’adaptabilité pour continuer, malgré tout.

« Plus on est actif, plus on a de chance de se rétablir »

Interview de Rodolf Mongondry, responsable APA au Centre Léon Bérard.

« Avant l’espace sport dédié ‘‘Pyramide’’, les activités étaient externalisées ou organisées en chambre. Depuis décembre 2018, dans cet espace de 300 m2, nous, les huit enseignants APA, dispensons marche nordique, zumba, pilates, parcours santé, yoga, mais aussi foot, basket, ping pong pour les plus jeunes… En trois ans, quelque 1 000 patients ont pu bénéficier d’un accompagnement sportif.

Certains, isolés en chambre stérile, continuent d’avoir un suivi personnalisé. Quand d’autres, qui peuvent être en extérieur, pratiquent du cardio-training en groupe. Pour tous, il est d’abord question d’un bilan des capacités physiques, afin de qualifier la ou les activités les plus adaptées sur ordonnance. Même pendant les confinements dus à la pandémie, on n’a jamais arrêté d’être mobilisés, via des cours en live sur les réseaux sociaux, qu’on poursuivra, notamment pour les patients qui n’habitent pas à côté. »

Zoom sur l’association Sourire à la vie

L’association marseillaise Sourire à la vie accompagne chaque année quelques 350 enfants, ados et jeunes adultes atteints du cancer avec l’hôpital de la Timone à Marseille. Pour les 10 000 interventions sportives qu’elle a à son actif, elle s’appuie sur les médecins du service d’oncologie pédiatrique pour proposer des soins de support et de répit, que ce soit en secteur protégé, en hôpital de jour, en service de chirurgie ou en unité de greffe.

Et depuis cette année, après s’être implantée à Nice en 2018, Sourire à la vie intervient également en Bourgogne-Franche-Comté, au sein du Centre hospitalier régional universitaire de Besançon et à Dijon. En 2022, ce sera au tour de Nantes et Montpellier.

Rencontre avec Morgane Harlé, porte-parole de l’association Sourire à la vie

« Un enfant hospitalisé passe moins d’une heure debout par jour. Quand le diagnostic tombe, tout s’arrête, le mouvement avec. C’est en se rendant au chevet de ces enfants cloués au lit que Frédéric Sotteau, ex champion de voile, a commencé, il y a 15 ans, à faire bouger les choses en région Paca où se concentre un important service cancéro-pédiatrique, pour offrir un vrai exutoire aux enfants.

Pour voir prospérer ces interventions sur le territoire français, il a fallu mettre en place un modèle simple à dupliquer, dans de petits services, afin qu’on nous alloue une salle, un espace, ou même que l’on investisse les couloirs des hôpitaux. A l’extérieur, l’association convie les enfants aux Phare des sourires à Marseille, une sorte de colonie des enfants malades, où tous apprennent l’autonomie malgré les séquelles. Plus loin encore, une poignée de jeunes met le cap sur la Laponie en chien de traineau, en Polynésie, ou en Méditerranée via un catamaran. Des sorties extraordinaires pour contrebalancer avec tout ce que vivent les enfants, et les challenger. »

Le coin des sources et ressources

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