Un an après la mise en place d’une plateforme pour recueillir la parole de victimes de violences dans le sport, le ministère a dévoilé les premiers chiffres à l’occasion de la 2e Convention nationale de prévention contre les violences dans le sport.
Plusieurs ministres étaient présents, dont la ministre déléguée en charge des Sports Roxana Maracineanu, le ministre de l’Éducation Nationale Jean-Michel Blanquer, et le garde des Sceaux Éric Dupont-Moretti. « Aimer et protéger le sport, c’est regarder en face ses vicissitudes » a rappelé Roxana Maracineanu.
L’occasion de donner un premier bilan chiffré. Près de 445 personnes ont été mises en cause à ce jour via des signalements remontés à la cellule dédiée aux violences sexuelles dans le sport, a indiqué la ministre chargée des Sports.
« Depuis un an, 407 affaires ont été traitées ou sont en cours de traitement par la cellule mettant en cause 445 personnes », a-t-elle précisé.
12 fédérations « concentrent 66% des affaires »
Cette cellule avait été mise en place l’hiver dernier après les révélations de la patineuse Sarah Abitbol, qui a raconté dans un livre, «Un si long silence» (Plon), comment elle a été violée par son entraîneur entre 15 et 17 ans, au début des années 90. Un premier état des lieux détaillé établi à la mi-février décomptait 387 signalements et 421 personnes mises en cause dont 245 éducateurs professionnels ou bénévoles (188 et 57 respectivement). 96% sont des hommes.
La déléguée ministérielle chargée des violences sexuelles dans le sport, Fabienne Bourdais, a précisé lors de la 2e Convention que « 48 fédérations sportives » étaient concernées et 12 « concentrent 66% des affaires ».
83% des victimes sont des femmes
Les femmes sont les premières touchées : elles représentent 83% des victimes, et 82% étaient mineures au moment des faits. Enfin, 90% des signalements concernent des violences à caractère sexuel.
Autre chiffre relevé par tous les participants à cette Convention, y compris par le Garde des Sceaux, Eric Dupont-Moretti, venu assurer du soutien de la justice, « 63% des cas concernent des mineurs de moins de quinze ans ».
« Dénoncer les violences dans le sport, ce n’est pas dénigrer le sport ou dévaloriser ses acteurs. C’est même tout l’inverse », dixit Roxana Maracineanu. Fabienne Bourdais a relevé que « 25 signalements » émanaient de structures de haut niveau, ce qui signifie que « la grande majorité des faits se déroulent dans des clubs classiques ».
« La grande majorité des faits se déroulent dans des clubs classiques »
191 mesures d’interdiction administratives ont été prononcées par les préfets. 29 agents publics sont aussi concernés, dont 16 du ministère des Sports et 11 de l’Education nationale dont 7 professeurs d’EPS.
Témoignant en tant que présidente de la Cour d’Assises du Loiret, Aude Cristau, a expliqué que « le milieu du sport attire des prédateurs, comme l’école », évoquant le cas d’un moniteur de cyclisme sur route coupable de « 19 viols ». Elle a aussi insisté sur les symptômes de stress post-traumatique dont sont atteints les victimes (scarifications, troubles alimentaires, mutisme…). « J’ai des petites filles qui se cachent sous mon bureau », incapables de parler, a-t-elle expliqué. Elle a également évoqué la difficulté de parler des crimes subis, car souvent synonyme de rupture avec le milieu du sport. « J’ai eu une petite cavalière qui m’a dit: +j’ai préféré subir plutôt que de rompre mon parcours de compétition+», a-t-elle encore raconté.
« Nous avons bâti un réseau de 74 référents dans les fédérations sportives et ils sont chargés de suivre les procédures et notamment d’informer l’État des poursuites disciplinaires fédérales engagées, a rappelé la ministre. Près de vingt fédérations se sont dotées d’un plan de prévention (…) pour prévenir toute dérive dans leurs clubs. Trente autres construisent actuellement ce dispositif. »
Le gouvernement vient de publier à ce propos un décret permettent aux fédérations et associations sportives d’enquêter sur les antécédents des éducateurs ou bénévoles, ainsi que deux arrêtés.