Le 5 novembre prochain, 37 équipages prendront le départ de la Transat Jacques Vabre 2017 au Havre, direction Salvador de Bahia au Brésil. Parmi eux, Servane Escoffier et Louis Burton, en couple à la ville, s’élanceront pour la première fois tous les deux à bord de leur nouveau bateau Bureau Vallée 2, vainqueur du dernier Vendée Globe (catégorie IMOCA). Si Louis n’a cessé d’engranger de l’expérience ces dernières années avec six courses au compteur depuis sa première Route du Rhum en 2010, Servane, quant à elle, est sur le point d’opérer son grand retour à la compétition sur cette traversée de l’Atlantique.
Ils voulaient naviguer ensemble depuis longtemps, avant même d’être en couple. Puis l’arrivée de leur premier enfant, Lino, en 2011, celle de la petite Edith deux ans plus tard et la participation de Louis Burton au Vendée Globe 2016 (qu’il a terminé en 7ème position) ont quelque peu retardé les choses. Cette année, Servane Escoffier et Louis Burton ont enfin l’opportunité de participer ensemble à la Transat Jacques Vabre 2017 dont le départ sera donné au Havre le 5 novembre prochain. « Nous deux sur le bateau, on y arrive enfin après six ans ! », rigole Servane, figure de la voile féminine. Et il s’agit d’une « double première » puisque le couple malouin va réaliser la traversée de l’Atlantique à bord d’un tout nouveau bateau : Bureau Vallée 2, l’IMOCA à foils vainqueur du dernier Vendée Globe [skippé par Armel Le Cléac’h, ndlr], racheté par Bureau Vallée – fidèle sponsor de Louis Burton depuis 2010 – à la Banque Populaire.
« On sera face aux ténors de la catégorie »
Avec ses foils, son poids d’une tonne et demie de moins que Bureau Vallée 1 (l’ancien bateau de Louis), et son mât rotatif, l’IMOCA Bureau Vallée 2 est une « machine de guerre ». Pour le prendre en main, Louis et Servane ont d’abord navigué avec l’ancienne équipe au printemps dernier. Ensuite, ils ont commencé à voguer seuls et pris part à plusieurs courses notamment la Cowes Dinard en juillet, la Rolex Fasnet Race en août et le Défi Azimut en septembre face aux bateaux contre lesquels ils seront concurrents sur la Transat Jacques Vabre. « On a vraiment changé de niveau avec ce gros bateau. On va se retrouver avec les ténors de la catégorie […] Certains ont déjà fait le Vendée Globe avec leur bateau. C’est sûr qu’on part avec moins de connaissances mais on a déjà fait un grand bond en avant dans l’apprentissage et c’est très encourageant », explique Servane.
Pour autant, le couple de navigateurs ne part pas en croisière. Tous deux ont des ambitions de résultats et veulent absolument « bien figurer » avec Bureau Vallée 2. « Tout l’enjeu sera de rester calmes, d’accepter qu’on a un déficit et de garder notre sang-froid », commente Servane. L’avantage, c’est qu’à bord, Servane et Louis s’entendent plutôt bien et se complètent. « Louis est un passionné de sport mécanique en tout genre et de vitesse. Donc, il faut toujours que ça aille très vite avec lui, ce qui est plutôt bien pour la compétition. De mon côté, avec mon expérience de tour du monde, j’ai peut-être plus tendance à anticiper les problèmes. », complète la navigatrice de 36 ans. « On espère que le mélange des deux nous permettra de prendre les bonnes décisions ».
Servane, de retour à la compétition
À eux deux, Servane et Louis ont des milles de course dans les pattes : trois Transat Jacques Vabre, deux Route du Rhum et deux Vendée Globe (dont un bouclé) pour lui ; et deux Transat Jacques Vabre, sept Tour de France à la voile, deux Route du Rhum et un Barcelona World Race pour elle. Cette année, la Transat Jacques Vabre aura néanmoins une toute autre saveur pour Servane puisqu’elle signe son grand retour à la course au large. « J’ai eu de très heureux événements pendant mes six années d’absence mais pour être honnête, je suis très contente de revenir. Et je suis très contente que ce soit avec Louis et notre nouveau bateau. C’est assez excitant ! ».
« J’avais besoin que mes enfants connaissent la navigatrice » – Servane Escoffier
Seule ombre au tableau ? Être loin de ses enfants pendant deux semaines. « C’est ce qui est le plus difficile, confie Servane Escoffier. J’avais peur qu’ils trouvent ça long. ». Heureusement, le couple a trouvé un moyen de se rassurer : pendant un déjeuner en famille, Louis a attrapé un globe terrestre pour montrer à ses enfants la route qu’il avait faite pour le Vendée Globe l’an dernier. « Il leur a dit ‘vous voyez, avec maman on va partir du Havre jusqu’au Brésil’. Ils avaient en tête le tour du monde de leur père. Donc, forcément, ils ont trouvé ça court. Ils nous ont dit ‘ c’est tout ? ‘. Ça nous a beaucoup rassurés », avoue Servane. À bord, les deux jeunes parents pourront communiquer avec leurs enfants par mail pendant la Transat : « On leur racontera ce qu’on voit : des dauphins, des étoiles filantes, et puis la course aussi. […] Je crois que quelque part, intérieurement, j’avais besoin qu’ils me connaissent aussi de cette manière ».
Pour le couple, cette Transat Jacques Vabre 2017 est le début d’un cycle de quatre ans qui amènera Louis Burton jusqu’au prochain Vendée Globe en 2020-2021. À leur retour, avec le Réseau Mer Entreprendre qu’ils ont créé en 2013, ils aideront également de jeunes talents à s’engager sur les plus grandes transats tout en gérant leur propre écurie de course au large, BE Racing. Toujours ensemble, toujours proches de la mer.
Servane, un petit mot sur la voile féminine ?
« Après une absence totale de femmes sur le dernier Vendée Globe, on sera six femmes à prendre le départ de la Transat Jacques Vabre 2017, sur un total de 37 équipages partants. C’est peu, mais à la fois beaucoup. Il faut savoir que la voile est un des derniers sports mixtes avec l’équitation, c’est-à-dire que le classement est le même pour les hommes et les femmes. C’est quelque chose qui me plaît beaucoup parce qu’on peut réellement parler d’égalité. Personnellement, je n’ai jamais ressenti de problème à être une femme dans la voile : j’ai déjà navigué dans des équipages 100% féminins, des équipages mixtes ou même des équipages où j’étais le seule femme à bord et cela s’est très bien passé à chaque fois. Souvent, c’est plus dur physiquement pour une femme que pour un homme, notamment pour le matossage (ndlr : déplacement des poids sur le bateau pour optimiser la vitesse). On essaie de pallier à ça par de l’anticipation. Et puis les femmes ont une très bonne image dans la voile. ».
À PROPOS DE SERVANE ESCOFFIER
Née à Saint-Malo en 1986, Servane Escoffier est issue d’une famille de navigateurs. Après avoir obtenu un diplôme de commerce international à La Rochelle, elle se lance dans la régate. Avec son père Bob Escoffier, skipper professionnel depuis 1989, elle se classe 12ème de sa première Transat Jacques Vabre en 2003 sur le monocoque Addecco (IMOCA 60’). Deux ans plus tard, elle atteint la 3ème place de la compétition en compagnie de Bertrand de Broc (OPEN 50’). En 2006, elle termine 2ème de la Route du Rhum (OPEN 50’) et 7ème lors de sa deuxième participation en 2010 (multi 23 mètres). Entre 2001 et 2007, Servane Escoffier réalise sept Tour de France à la voile. Elle rencontre son compagnon Louis Burton, entrepreneur parisien, lors de la Route du Rhum 2010. Pour elle, il quitte la capitale et s’installe à Saint-Malo. Ensemble, ils ont deux enfants – Lino, 6 ans, et Edith 4 ans – et créent leur propre écurie de course au large : BE Racing. En 2017, ils participent en couple à la Transat Jacques Vabre et se lancent un nouveau défi : accompagner Louis Burton pour une aventure de 4 ans jusqu’au prochain Vendée Globe.