Après avoir sondé plus de 260 joueuses internationales de 26 nations (sur 32) ayant participé à la Coupe du monde féminine 2023 (20 juillet-20 août), afin de connaître leur situation financière, le syndicat mondial des joueurs (FIFPRO) constate des problèmes touchant notamment à la préparation de la compétition, la récupération et a l’indemnisation.
Le résultat est sans appel : une joueuse internationale sur trois touche moins de 30.000 $ (environ 27.000 €) par an (club et sélection cumulé). Selon la même enquête, une joueuse internationale sur cinq affirme compléter ses revenus avec un deuxième emploi tant les salaires perçus en club sont faibles.
Si une adaptation de la charge de travail est également demandée, la FIFPRO cherche à mettre la pression sur les instances du football pour une meilleure rémunération des joueuses, principal chantier du football féminin dans sa quête de professionnalisation. Au travers de son enquête, le syndicat mondial des joueurs et joueuses professionnels pointent des conditions encore alarmantes en comparaison avec celles des hommes. « 49 % des joueuses ont déclaré avoir gagné moins de 50.000 $ (45.600 €) avec leur club et leur équipe nationale au cours de l’année écoulée ; 6 % ont gagné moins de 10.000 $ (9.100 €) et 8 % moins de 5.000 $ (4.550 €). 15 % des joueuses avaient un revenu supérieur à 150.000 $ (137000 €), soit la tranche la plus élevée de l’enquête », révèle la FIFPRO. Mais aussi 53 % des joueuses estiment ne pas avoir eu le repos nécessaire avant leur entrée en lice en Coupe du monde. Une joueuse estime avoir été « mentalement épuisant » de passer de la Coupe du monde au football de club sans disposer d’un temps de récupération suffisant. Plus généralement, ce sont 66 % des athlètes qui estiment ne pas avoir été au meilleur de leur forme physique en début de compétition. « Ce qui met en évidence les problèmes persistants liés au calendrier des matchs internationaux et à la préparation des joueuses », explique la FIFPRO.
Depuis 2011, la FIFA se calque sur le modèle masculin et organise la Coupe du monde à l’issue de la saison sportive des clubs, la faisant débuter en juin et conclure en juillet. Mais pour cette édition en Australie et Nouvelle-Zélande, le choix s’est porté sur des dates plus tardives, coïncidant avec la préparation estivale habituelle des clubs européens, plus gros fournisseurs de joueuses. « J’essayais de me reposer et de me préparer en même temps, ce qui ne fonctionne pas vraiment », explique une joueuse au syndicat. Par ailleurs, les conditions de voyage diffèrent aussi des sélections masculines : 20 % des joueuses ont effectué le vol retour dans leur pays d’origine en classe économique. Plus grave encore, la FIFA n’aurait pas respecté ses obligations médicales. Parmi les 260 joueuses interrogées, 10 % indiquent ne pas avoir subi d’examen médical avant la compétition et 22 % n’auraient pas passé d’électrocardiogramme « alors que ces deux examens sont prévus dans les règlements de la FIFA », souligne la FIFPRO.
Un bilan moins reluisant que celui dressé par la FIFA à la veille de la finale du Mondial remporté par l’Espagne. Selon la fédération internationale, la Coupe du monde féminine a généré plus de 570 M$ de revenus (520 M€), et atteint le seuil de rentabilité de la compétition. Une première. Mais pour la FIFPRO, il n’y a pas de ruissellement jusqu’aux joueuses. Preuve en est, près de 20% des joueuses n’ont toujours pas reçu leur prime de participation au Mondial. Un total de six pays sur les 32 participants freinent même le versement des primes pour « des raisons fiscales » révèle le média The Atletic.
L’édition 2023 du Mondial féminin est la toute première des Coupes du monde où l’ensemble des équipes perçoivent une rémunération pour leur participation, via un chèque total de 150 M$. Sur ce montant, une part minimale de 30 % des primes de la Coupe du monde doit revenir aux joueuses. Cette part garantit en théorie à chaque joueuse un minimum de 30.000 $ avant impôts.