Nous l’avions quittée sur les terrains de Lyon en juin 2018. Cet été, nous avons retrouvé Élodie Thomis sur les antennes de TF1, pour la Coupe du monde féminine de football en France. L’ancienne attaquante des Bleues y animait la pastille « Les Envoyées très spéciales » diffusée dans le Mag avec Camille Abily, une autre retraitée des terrains. Le concept était simple : Camille posait des questions aux joueuses tandis qu’Élodie filmait, en mode cool. Depuis qu’elle a rangé les crampons, l’ex-star du ballon rond s’est en effet reconvertie en journaliste reporter d’images (JRI), avec une affinité toute particulière pour la caméra. Son rêve : réaliser un documentaire animalier marin. Un virage en angle droit, mais pas une coïncidence !
Propos recueillis par Floriane Cantoro
Extrait du magazine WOMEN SPORTS N.14 d’octobre-novembre-décembre 2019

WOMEN SPORTS : En 2018, à 31 ans, vous décidez de mettre un terme à votre carrière de footballeuse professionnelle. Pourquoi ce choix, et pourquoi à ce moment-là ?
Élodie Thomis : Je commençais un peu à lâcher dans ma tête, à avoir d’autres ambitions que le football. Je préparais ma reconversion depuis quatre ans, et j’avais pas mal de blessures aussi. C’était un choix logique et réfléchi.
WS : Vous prépariez votre reconversion depuis 2014, soit longtemps avant votre retraite sportive. On peut dire que vous avez plutôt bien anticipé votre après-football !
E.T. : Je savais que je ne pourrai pas être footballeuse toute ma vie. J’ai toujours gardé cette lucidité par rapport à l’après-football. En 2014, j’ai commencé à me pencher sur ce que j’aimais faire. J’ai pris le temps. J’ai compris que mon avenir serait dans l’audiovisuel. Cependant, un BTS n’était pas envisageable pour moi avec le football. La personne en charge de la formation et de la scolarité au sein de l’OL (son club, ndlr) a donc trouvé une solution alternative en me proposant un stage de formation à l’OLTV. Pendant quatre ans, je prenais sur mes jours de repos pour venir me former. C’était vraiment aménagé en fonction de mes disponibilités.
WS : Pourquoi la caméra ?
E.T. : Pendant le premier mois de mon stage, j’ai observé tous les métiers de l’audiovisuel pour me faire une idée. Et il se trouve que c’est la caméra qui me correspondait le mieux. J’ai toujours aimé filmer, aimé les images. Mais je ne me suis pas contentée d’apprendre le métier de caméraman. J’ai été formée en tant que JRI (journaliste reporter d’images, ndlr). Mon mentor au sein de l’OLTV m’a appris à filmer mais aussi à interviewer, à poser les questions, à monter les vidéos… Il voulait que je sois indépendante et autonome, et il a eu raison.

WS : Comment s’est ensuite passée la transition des terrains à la caméra ?
E.T. : Je m’étais toujours dit qu’après le foot, je prendrais une belle année sabbatique. Raté ! Je me suis vite rendue compte que les titres de championnes sur mon CV ne suffiraient pas… J’ai fait quelques formations pour enrichir mon bagage professionnel dans le milieu, et investi dans du matériel technique. Je suis en train de passer la Validation des acquis de l’expérience (VAE) pour obtenir mon BTS audiovisuel. Enfin, j’ai lancé ma propre boîte de production aux dépens d’un CDI proposé par l’OL car j’avais besoin de voler de mes propres ailes. Ce qui ne m’empêche pas de continuer à travailler pour le club de temps en temps, en tant que prestataire de services.
« La réalité c’est que demain, même le plus gros salaire du football féminin devra travailler après sa carrière. »
WS : Quel souvenir gardez-vous de votre expérience sur TF1 pour la Coupe du monde féminine aux côtés de Camille Abily ?
E.T. : Malheureusement, la France n’a pas eu le résultat escompté (défaite 2-1 en quart-de-finale face aux championnes américaines, ndlr) mais personnellement, j’en sors extrêmement grandie. Outre la pastille « Les Envoyées très spéciales » diffusée dans « Le Mag, de la Coupe du monde », je faisais énormément de choses en coulisses et avec le public. J’étais considérée comme une vraie JRI et pas comme la « footballeuse de service ». J’ai pris une autre dimension professionnellement.
WS : Aujourd’hui, les jeunes footballeuses sont-elles aussi sensibles que vous aux thématiques de la formation et de la reconversion ?
E.T. : Avec les filles de ma génération, on essaie de les alerter sur ces sujets. On leur conseille de passer des diplômes et de faire des formations. Tout au long de sa carrière, une footballeuse professionnelle est assistée : elle n’a besoin de s’occuper de rien si ce n’est de bien jouer au football. Quand tout s’arrête, c’est difficile. Surtout si elle ne sait pas quoi faire derrière. Certaines filles ne s’en rendent pas compte : elles sont dans leur rêve, leur vie de pro, ont des sponsors et des milliers d’abonnés sur les réseaux sociaux. Mais la réalité c’est que demain, même le plus gros salaire du football féminin devra travailler après sa carrière car les revenus ne suivront pas. On n’est pas dans le football masculin.
WS : Le football vous manque-t-il aujourd’hui ?
E.T. : Pas du tout ! Au risque de vous choquer, je n’ai jamais été une dingue de foot. J’ai appris à aimer ce sport au fil du temps. Je ne regrette absolument pas ma carrière mais je suis très heureuse d’être là où je suis aujourd’hui. Je n’ai aucune nostalgie du football, j’ai tourné la page.
WS : Quelles sont vos envies professionnelles à la caméra ?
E.T. : Je garderai toujours un pied dans le foot car c’est mon identité. Dix-sept ans de terrain, ce n’est pas rien ! J’ai des contacts et je sais comment le milieu fonctionne. Mais je ne compte pas me cantonner au football, ni même au sport. L’audiovisuel offre des opportunités très variées et j’ai envie de tout explorer. J’aimerais voyager. L’idéal, dans des années, serait de faire un documentaire animalier marin. Bon, pour le moment j’ai peur de l’eau mais d’ici-là, ça peut encore s’arranger (rires).
PALMARÈS AU FOOTBALL
● 11 fois Championne de France avec l’OL
● 7 fois Vainqueur de la Coupe du France avec l’OL
● 5 fois Vainqueur de la Ligue des Champions avec l’OL
● 141 sélections en équipe de France (32 buts)
