Nommée le 26 septembre dernier par Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale, Nathalie Costantini est la nouvelle directrice nationale de l’Union nationale du sport scolaire (UNSS). Ancienne professeure d’éducation physique et sportive, dernièrement vice-rectrice de l’Académie de Mayotte, elle veut montrer que le sport scolaire a toute sa place dans la mise en oeuvre les politiques d’éducation, et qu’il peut aussi être un bel atout pour nos jeunes, notamment les filles.
Propos recueillis par Floriane Cantoro
Extrait du magazine WOMEN SPORTS N.11 de janvier-février-mars 2019
WOMEN SPORTS : Comment s’est passée votre prise de poste en septembre dernier ? Avez-vous échangé avec Laurent Petrynka, votre prédécesseur ?
Nathalie Costantini : J’ai pris mes nouvelles fonctions à la fois tardivement, car l’année scolaire avait démarré, à la fois très rapidement car j’ai immédiatement été dans l’action. La structure ne m’était pas complètement inconnue de part mes anciennes professions. Je connaissais le projet national de développement du sport scolaire puisque l’Académie que je pilotais, Mayotte, avait construit son projet académique en lien avec ce projet national. Depuis ma nomination, je m’entretiens régulièrement avec Laurent Petrynka afin que nous puissions échanger sur les dossiers en cours de l’UNSS, notamment un en particulier : la candidature de la France, via la région Normandie, pour les Jeux olympiques du sport scolaire de 2022 qui a été déposée auprès de la Fédération internationale du sport scolaire dont le président n’est autre que… Laurent Petrynka justement.
Quels seront les dossiers prioritaires de l’UNSS sous votre direction ?
Notre candidature pour les Jeux olympiques du sport scolaire est un dossier prioritaire car il permettrait de faire rayonner le savoir-faire français à l’international. Maintenant, notre challenge sera aussi de porter ce dossier d’envergure sans toutefois oublier tous les autres dossiers qui sont dans le giron de l’UNSS. Il faudra notamment continuer à faire du sport scolaire un bon relais des valeurs que porte l’École de la République. Ensuite, j’aimerais développer davantage la partie association sportive, c’est-à-dire montrer que le sport scolaire a toute sa place pour participer à la mise en oeuvre les politiques d’éducation telles que le Ministre veut les appliquer. Autrement dit, se servir du sport scolaire comme d’un prétexte pour engager les jeunes qui trouveront une motivation particulière dans le sport, à apprendre des choses (ex : l’informatique, pour pouvoir faire des tableaux de résultats en compétition). Enfin, je souhaiterais également travailler sur deux dispositifs particuliers : le « savoir nager » et le Premier Secours Civique (PSC). Le premier permettrait aux jeunes licenciés de l’UNSS d’avoir la garantie d’apprendre à nager. Le second leur apprendrait, face à des situations d’incidents, à adopter des savoir-être et des savoir-faire particuliers, permettant d’agir sur le corps de l’autre. De fait, ce serait aussi un moyen de lutter contre les discriminations et les violences que les jeunes vivent parfois malheureusement dans le temps de l’école.
L’UNSS est la fédération sportive qui compte le plus de licences féminines alors même que l’adolescence est une période où de nombreuses jeunes filles arrêtent de faire du sport (transformation du corps, dégradation de l’estime de soi, peur du regard des autres…). Comment l’expliquez-vous ?
Je serais malhonnête de revendiquer une totale réussite sur ce point… Effectivement, l’UNSS est la première fédération sportive féminine en France, mais parce qu’elle capte très tôt beaucoup de jeunes filles. Malheureusement, nous enregistrons nous aussi une chute du nombre de pratiquantes à l’adolescence. Nous avons un décrochage flagrant sur les catégories de jeunes à partir du niveau cadettes (14-15 ans). Pour les raisons que vous évoquez mais également parce que d’autres envies surgissent chez les jeunes filles durant cette période, comme le fait de se retrouver en dehors de l’école et du sport pour faire de nouvelles activités.
Quelle est la stratégie de l’UNSS pour capter ce jeune public féminin ?
Nous agissons sur deux axes. Premièrement, nous essayons de fidéliser encore plus tôt et intensément nos jeunes sportives afin que cette habitude de pratique physique soit quelque chose qu’elles n’aient pas envie d’abandonner. Pour cela, nous jouons sur l’habitus santé et le côté hygiène : leur prouver que faire du sport est le meilleur moyen de rester en bonne santé. Pour donner une place aux adolescentes dans le sport, nous travaillons également sur toutes les fonctions connexes aux fonctions de pratiquantes : jeunes reporters, jeunes coachs, jeunes arbitres, jeunes secouristes… Si l’UNSS a autant de licenciées féminines, c’est parce qu’elle met toujours en avant la possibilité de prendre des engagements et des responsabilités. Et, bien souvent, ce sont plutôt les filles qui acceptent d’occuper de tels rôles. C’est visible sur les postes de délégués des classes, par exemple.
En 2018, des milliers de jeunes filles ont couru la Lycéenne MAIF Run aux quatre coins de la France. Quel est le message de cette course 100% féminine organisée par l’UNSS ?
Il est double. D’une part, c’est un message culturel et sociétal. Culturellement, l’homme a du temps libre pour faire du sport alors que la femme n’en a pas. Il s’agit de montrer que les femmes, elles aussi, ont besoin de se réaliser au travers de la pratique sportive. D’autre part, c’est un message de bien-être et d’habitus santé pour prendre conscience de l’importance de préserver ce patrimoine extraordinaire qu’est notre corps. L’événément comporte cette notion « d’héritage » chère à Paris 2024 : il s’agit d’une capitalisation du passé et d’un don pour l’avenir en matière de pratique sportive féminine.
Dans un récent entretien à Sportmag, vous avez déclarez que « la mixité [faisait] partie des objectifs de nombreuses fédérations et […] que l’UNSS [était] en avance sur beaucoup sur ces sujets-là ». Comment s’organise la mixité au sein de l’UNSS ?
Le sport scolaire doit toujours être mis en perspective avec l’EPS. La mixité est donc très fréquente puisque les classes sont mixtes. Nous essayons de travailler le plus possible en mixité car elle est importante pour faire comprendre et accepter les différences. En effet, il faut voir ce que font les autres (plus précisément, ce que font les garçons pour les filles, et ce que font les filles pour les garçons) pour comprendre les différences et les accepter. La mixité est donc quelque chose qu’il faut mettre en avant au sein de l’UNSS. Mais pas à n’importe quel prix ! La mixité est une vertu, elle n’est pas une fin en soi. Tant en EPS que dans le sport scolaire, l’intégrité physique des enfants qui nous sont confiés doit toujours être le premier objectif commun. Il y a des moments où la mixité n’est pas possible : les différences physiques entre les garçons et les filles (force, puissance, stature) sont telles qu’il est parfois absolument impossible de les faire jouer ensemble.
Il y a peu, l’UNSS a signé un partenariat inédit avec le PSG Handball pour permettre à des dizaines de collégiens et lycéens parisiens de découvrir les métiers de l’événementiel sportif. Une nouvelle vocation pour l’instance ?
Le sport scolaire a beaucoup à faire sur la question de l’orientation et du projet professionnel des jeunes. Ce partenariat va permettre de leur montrer qu’un club sportif, ce n’est pas simplement des personnes bénévoles qui se réunissent pour organiser un temps de loisir. Parfois, cela peut être une véritable entreprise avec un manager, un comptable, un secrétaire, un staff technique et médical… Le sport scolaire doit permette aux jeunes de découvrir des orientations afin qu’ils puissent se dire : « Ce que je fais dans le sport scolaire, je vais pouvoir le faire perdurer et en faire ma profession. » Il s’agit de montrer que l’UNSS est capable de former les futurs dirigeants, cadres et responsables des clubs sportifs fédéraux.
Statistiques de l’UNSS sur l’année scolaire 2017-2018
PARCOURS PROFESSIONNEL DE NATHALIE COSTANTINI :
1984 : Obtention du CAPES
1984-2001 : Professeure d’éducation physique et sportive (EPS) en collège, en lycée et en lycée professionnel
2001 : Reçue au concours d’inspecteur en EPS
2001-2005 : Inspectrice en EPS dans l’Académie de Grenoble
2005-2008 : Chargée de la formation continue de l’ensemble du personnel de l’Académie de Grenoble
2008-2011 : Inspectrice adjointe d’Académie en Haute-Savoie
2011-2014 : Inspectrice d’Académie en Ariège
2014-2018 : Vice-rectrice de l’Académie de Mayotte
Depuis septembre 2018 : Directrice nationale de l’UNSS
Pour en savoir plus sur la thématique, rendez-vous sur le site officiel de l’Union nationale du sport scolaire.