Médaillée de bronze en snowboardcross aux derniers Jeux Olympiques de Sotchi en 2014, vice-championne du monde 2017, de multiples podiums en Coupe du monde… À 23 ans, la Française Chloé Trespeuch a déjà un joli petit palmarès à son actif. Mais la rideuse de Val Thorens ne compte pas en rester là : depuis quatre ans, elle a les JO de PyeongChang dans le viseur avec, comme cible principale, l’or, évidemment. Un objectif rondement préparé.
Par Floriane Cantoro Extrait du magazine Women Sports N°7 Spécial hiver – Janvier/Février/Mars 2018. DOSSIER PYEONGCHANG 2018 : la snowboardeuse Chloé Trespeuch nous sert de guide dans ce voyage vers les JO à venir.
Le 16 février 2014, à Sotchi, les Français découvraient un visage : celui de Chloé Trespeuch. Cette jeune fille de 19 ans qui, à la surprise générale, avait arraché le bronze en snowboardcross, devenant ainsi la plus jeune médaillée olympique de la discipline. Depuis Sotchi, la rideuse de Val Thorens a fait du chemin et s’est bâtie un joli palmarès : de multiples podiums en Coupe du monde et une médaille d’argent aux Mondiaux décrochée l’hiver dernier à Sierra Nevada en Espagne. Des titres qui font d’elle une sérieuse prétendante à l’or à PyeongChang en Corée du Sud.
Les JO dans la peau
Sa passion pour le snowboardcross – ou boardercross – est née très tôt. « C’est mon frère Léo qui m’a initiée à ce sport et j’ai rapidement accroché, se souvient Chloé. Ce qui m’a plu, c’est l’aspect stratégique de la discipline et la course. Cette confrontation directe avec les concurrents qui n’existe pas dans d’autres épreuves, comme notamment le ski alpin où celui qui gagne est celui qui fait le meilleur chrono. » De fil en aiguille, sans même qu’elle ne s’en rende compte, le haut niveau est donc devenu une évidence. « Ça s’est fait assez naturellement, admet-elle. J’ai été passionnée très tôt par la compétition. À 8 ans, je pensais déjà aux Championnats du monde, aux Jeux Olympiques… »
Un sport-études au collège à Moûtiers et un second cycle au Pôle France d’Albertville lui permettront de concrétiser ses rêves d’enfance. Pendant ses trois années de lycée, Chloé est libérée six mois de l’année l’hiver pour pouvoir s’entraîner et s’aligner au départ des compétitions européennes et internationales. « On avait cours l’été, quand les copains étaient en vacances. Ça m’allait bien ! »
Elle participe à sa première étape de Coupe du monde en 2011, à tout juste 17 ans. En 2014, quelques semaines avant Sotchi, elle termine à la quatrième place en individuel pour la première fois de sa carrière. Le signe d’une potentielle médaille à aller chercher en Russie.
Grâce au soutien de ses sponsors, Chloé peut se concentrer sur le snowboard.
«Être prête le Jour J»
De retour de Sotchi avec du bronze autour du cou, Chloé s’est rapidement replongée dans sa préparation… pour les JO suivants ! L’équipe de France de boardercross a progressivement augmenté l’intensité de ses entraînements sur la neige et en salle de sport en vue de PyeongChang. Cette année plus que toutes les autres, le calendrier est serré ! Mais pas question pour autant de délaisser les autres rendez-vous de la saison. « Je veux vraiment me servir de chaque événement, de chaque étape de Coupe du monde pour me préparer pour les Jeux, explique Chloé. C’est ça qui va m’amener le mental, la confiance et la technique pour être prête le Jour J.»
«Jusqu’à présent, la pression m’a toujours apporté une énergie supplémentaire. »
Cette fois-ci, elle part en Corée du Sud avec un statut tout autre que la dernière fois : celui de médaillée olympique. Mais ça ne lui fait pas peur : « J’aime bien les grands enjeux. Jusqu’à présent, la pression m’a toujours apporté une énergie supplémentaire. »
À côté de PyeongChang, Chloé a un deuxième objectif « pratiquement aussi important » cette saison : gagner le maximum de courses pour aller chercher le globe de cristal qui récompense la meilleure rideuse de l’hiver en Coupe du monde.
La SNCF l’a mise sur les rails
Une saison ambitieuse donc, mais abordée sereinement. Il faut dire que Chloé est bien entourée. Par la SNCF, notamment, dont elle a intégré le dispositif «Athlètes» (voir ci-dessous) il y a un peu plus d’un an. « C’est une chance pour nous, les athlètes issus des sports non professionnels, car il n’est pas toujours évident de vivre de notre sport », réagit la rideuse. Grâce à l’entreprise ferroviaire, elle bénéficie d’un CDI d’agent commercial en gare de Lyon-Part-Dieu – et donc d’un salaire mensuel – et est libérée quasiment toute l’année pour s’entraîner. « Ça soulage aussi, car on sait que l’après-carrière est préparé », complète-t-elle. Ce contrat prévoit l’équivalent d’un mois/un mois et demi de présence effective par an à la SNCF. Petit bonus (et non des moindres !) : en année olympique, les athlètes sont dégagés à 100% de leurs obligations envers l’entreprise.
LE DISPOSITIF «ATHLÈTES SNCF» Depuis 1982, la SNCF soutient le mouvement sportif français, dont les handisports, en offrant aux athlètes de haut-niveau la possibilité de trouver un équilibre entre carrière sportive et vie professionnelle. En effet, elle leur permet d’aménager leur temps de travail pour suivre les entraînements, les stages en équipes de France et participer aux compétitions, tout en leur apprenant un métier et en préparant leur reconversion professionnelle. En 2017, 35 athlètes français font partie de ce dispositif. Parmi eux, la taekwondoïste Haby Niaré, championne du monde 2013 et vice-championne olympique en 2016 à Rio, et la boxeuse Cyrielle Girodias, triple championne du monde (2013, 2015 et 2017).
Par ailleurs, la snowboardeuse peut compter sur de solides sponsors tels que le Team Lacoste, Toyota, les villes de Val Thorens et de Saint-Jean-de-Monts ainsi que les marques Caradiboï et GPA, son équipementier pour les masques et les casques. Le Suisse Nidecker lui fournit chaussures et fixations. Enfin, pour les planches, elle fait confiance à Oxess qui lui offre du matériel sur mesure. « J’ai la chance d’être bien accompagnée dans ma carrière sportive », mesure Chloé. En effet, avec un minimum de 5 planches par saison et à raison de 1000€ la planche, le budget d’une snowboardeuse de haut niveau pourrait rapidement devenir cauchemardesque sans équipementier. La Fédération française de ski (FFS), quant à elle, prend à sa charge les déplacements et l’encadrement de l’équipe de France (coachs et staff médical). Ce qui laisse aux athlètes le luxe de rester focus sur la partie purement sportive.
L’équitation en décompression
À côté du snowboard, Chloé Trespeuch pratique l’équitation en compétition.
Pour éviter les deux fléaux du sportif de haut-niveau – doute et pression – Chloé a ses solutions. Elles se nomment Cynthia et Vendôme, ses deux juments. À côté du snowboard, elle est en effet animée d’une seconde passion : l’équitation. «Je monte dès que je peux ; c’est mon bol d’air, ce qui me permet d’avoir un équilibre entre travail et plaisir. » Le soir après l’entraînement, à Saint-Jean- de-Monts en Vendée chez son père, le week-end… Tous les moments sont bons pour pratiquer. Et ne lui parlez pas de ralentir la cadence à l’approche de l’hiver ou de grands événements sur la neige. « Je ne peux pas sans cesse avoir peur de la blessure et pratiquer un sport extrême et de vitesse comme le snowboard, se défend Chloé. Sinon, impossible de se donner à 100%, on est freiné dans tout ce qu’on entreprend. » Et de poursuivre: « L’équitation m’apporte tellement de choses : du plaisir, du mental… C’est essentiel pour que je sois performante dans mon sport de toute façon. » De temps en temps, il lui arrive même de s’inscrire à des concours. Oui, car au cas où vous ne l’auriez pas remarqué, Chloé Trespeuch aime bien la compétition !
Chloé Trespeuch
Qui es-tu Chloé Trespeuch ?
Ton surnom ?
Dans l’équipe, ils m’appellent « Clu » parce qu’ils trouvent que « Chloé » c’est trop long. Sinon, il y a aussi « CloClo ».
As-tu des animaux de compagnie ?
J’ai un chien, Jipsy, et deux juments, Cynthia et Vendôme.
Ton statut ?
Je suis en couple depuis 4 ans et demi avec un rugbyman que j’ai rencontré lors d’un séjour de rééducation au CERS de Capbreton. Si nous ne nous étions pas blessés en même temps, nous ne nous serions probablement jamais rencontrés parce que le rugby, c’est pas trop mon truc.. et lui le ski non plus !
Quelle est ta devise ?
« Quand on veut on peut ». Ça résume bien la vie et l’esprit qu’il faut avoir pour réussir dans le sport.
Quel est le meilleur conseil qu’on t’ait donné ?
« Tout ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort ». C’est mon frère qui me le disait souvent quand nous étions plus jeunes, quand on chahutait un peu et qu’il me lançait des défis. Il me disait aussi qu’il fallait s’accrocher à ses rêves.
Ton plat préféré ?
La tartiflette.
Ton rituel au saut du lit le matin ?
Étirer un peu tous les muscles. Reprendre conscience de mon corps pour me mettre en route et être efficace ensuite à l’entraînement.
Ton rituel avant d’aller te coucher ?
Lire un peu pour m’endormir. Des romans ou des magazines d’équitation.
L’objet qui ne te quitte jamais ?
Un bonnet.
Ta tenue vestimentaire quotidienne ?
Un pantalon/jean, une chemise et des derby.
Ta tenue de soirée préférée ?
Une belle robe et des derby vernis.
Le sportif ou la sportive qui t’inspire et pourquoi ?
J’aime beaucoup Pénélope Leprévost. L’équitation est un sport mixte et elle a su faire ses preuves parmi les garçons. Elle est la meilleure cavalière du monde et j’admire beaucoup sa persévérance.
Quels sont les comptes Instagram que tu aimes bien consulter ? @jerryoftheday qui recense les chutes les plus improbables en ski ou en snowboard et @dogsofinstagram parce qu’il y a des chiens trop beaux.
L’endroit où tu aimerais aller surfer ?
L’Alaska.
Chloé Trespeuch, fidèle à son bonnet !
Snowboardeuse globe-trotteuse !
Le calendrier d’une professionnelle de la glisse
Janvier – Février – Mars
Saison de Coupe du monde (10 à 12 étapes) + Championnats du monde tous les 2 ans + Jeux Olympiques tous les 4 ans.
En 2018 : JO du 9 au 25 février en Corée du Sud, à PyeongChang.
Avril
Vacances. Une coupure mentale, plus que sportive : « Certaines pistes sont encore ouvertes à cette période, notamment à Val Thorens qui est la station la plus haute d’Europe ». Difficile de résister !
Mai
Reprise de l’entraînement physique au Centre national de ski et de snowboard d’Albertville : 2h30 le matin et 2h30 l’après-midi. Au programme : musculation, vélo, course à pied… « tout ce qui prépare le corps à être le plus solide et le plus performant possible sur la neige ».
Août
Retour à Albertville pour un mois de préparation physique.
Septembre « Comme il n’y a plus de neige nulle part en France, on part en Argentine ou au Chili où c’est la fin de l‘hiver pour faire un stage de trois semaines avec l’équipe de France ».
Décembre
Début de la saison de Coupe du monde, jusqu’à fin mars. « La saison de compétition est intense ; on est rarement chez nous. On rentre parfois entre deux étapes de Coupe du monde, un ou deux jours, mais c’est tout. ».